La transition médicale, ça sauve des vies. Il faut briser les barrières qui s’opposent à l’accès aux soins dont certaines personnes ont besoin

Un exposé de politique rédigé récemment décrit très bien les barrières à la transition médicale auxquelles font face les personnes bispirituelles, trans, non binaires et de diverses identités de genre (BTNB). Les frais à débourser, les temps d’attente et le manque d’accès à des médecins qualifié·e ·s ne sont que quelques exemples de ces barrières qui s'opposent à l'accès des personnes BTNB à des soins médicaux qui leurs sont vitaux.

Je suis une personne non binaire trans-masculine et j’ai personnellement fait face à plusieurs de ces obstacles pendant ma transition médicale.

Une de ces barrières est survenue lorsque j'ai fait une demande d’autorisation préalable à l’assurance-maladie de l’Ontario pour une phalloplastie. Cette chirurgie d’affirmation de genre est payée par le régime d’assurance-maladie lorsqu’elle est préalablement autorisée.

Ils ont approuvé ma demande, mais elle était conditionnelle à ce que la phalloplastie soit accompagnée d’une vaginectomie. Avant de procéder à une vaginectomie, une hystérectomie est médicalement requise.

J’étais furieux et sous le choc puisque l’hystérectomie et la vaginectomie ne sont pas médicalement nécessaires ou préalables à la phalloplastie, et en plus, je ne désirais aucunement ces interventions additionnelles.

J’avais donc le choix de soit me soumettre à des chirurgies non désirées et médicalement non nécessaires pour recevoir le financement de ma phalloplastie ou bien de continuer à vivre avec ma dysphorie de genre que seule la phalloplastie peut traiter.

Pendant plusieurs mois, j’ai essayé du mieux que je le pouvais d’expliquer à l’assurance-maladie que cette décision était discriminatoire et qu’elle violait les droits de la personne en plus d'exiger la stérilité. Malheureusement, il n'y avait rien à faire. Je n’arrivais pas à les raisonner et je me suis rendu à l’évidence que j’allais devoir me battre. J’ai donc porté appel de leur décision à la Commission d’appel et de révision des services de santé.

J’ai trouvé mon processus d’appel stressant et extrêmement exigeant émotionnellement, mais je me réconfortais en me disant que je le faisais également pour tous ceux qui n’avait pas le privilège de pouvoir se défendre. Je me sentais privilégié, car mon ami transgenre, Frank Nasca, qui en était à sa dernière année d’étude en droit, avait accepté de me représenter sans frais.

À plusieurs reprises, je me suis demandé combien de personnes avant moi s’étaient soumis à des chirurgies non désirées et médicalement non requises puisqu’elles n’avaient pas la force, le courage et les ressources de porter appel d’une telle décision. L’idée que certaines personnes s’étaient probablement soumis à des traitements médicaux non désirés me donnait la nausée, mais c’est ce qui m’a aussi donné l’énergie d’aller de l’avant avec mon appel et de me battre.

Après environ un an de bataille et à l’aube de mon audience à la Commission, l’assurance-maladie de l’Ontario a renversé sa décision et m’a accordé l’approbation préalable requise pour une phalloplastie sans vaginectomie concurrente. Cette approbation m'a été livrée sans excuse et sans explication.
Pire encore, ils ont renversé leur décision en juin 2023 et, aujourd’hui, cinq mois plus tard, le formulaire d’autorisation préalable n’est toujours pas changé. Les seules options de chirurgies disponibles dans le formulaire exigent une vaginectomie concurrente. J’ai fait plusieurs suivis avec le directeur général de l’assurance-maladie et même la ministre de la Santé pour leur demander de changer le formulaire, mais ils s’entêtent à perpétuer la discrimination systémique. Mon vécu n'est qu'une histoire parmi dans d'autres. Comme beaucoup de personnes BTNB, je m'aventure dans un système de santé qui n'a pas été construit pour répondre à leurs besoins. Qu'on parle du manque de financement, des temps d'attentes interminables et les politiques de coercition discriminatoires, nos communautés ne reçoivent pas les soins qui leur sont nécessaires.

Qu’adviendra-il de la prochaine personne BTNB qui ne veut pas de vaginectomie concurrente? Est-ce que son autorisation préalable sera refusée? Est-ce qu’elle aura l’énergie et le privilège de porter la décision en appel? Est-ce qu’elle se soumettra aux chirurgies non désirées afin de recevoir l’approbation et le financement de la chirurgie désirée?

Ces questions font partie des multiples raisons de l’urgence d’agir des différents paliers de gouvernement afin d’assurer une transition facile et sécuritaire des personnes BTNB.

Les recommandations de l’exposé de politique sont réalistes, essentielles et précisément ce dont les personnes BTNB ont besoin pour un accès universel à la transition. La transition n’est pas un ensemble de soins médicaux électifs, mais bien une nécessité médicale qui sauve des vies.

J’exhorte les différents paliers de gouvernement de mettre en œuvre, dès que possible, les recommandations suggérées dans l’exposé.

Par Nathaniel Le May

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CBRC

À propos de CBRC

Le Centre de recherche communautaire (CBRC) promeut la santé des personnes issues de la diversité sexuelle et de genre par le biais de la recherche et du développement d’interventions.
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